Une solution, la dissolution
Le Prince de Machiavel est en grande partie dédié à cette vérité immuable, en politique, la seule chose qui compte, c'est de durer, quels que soient les moyens employés.
Question : après la baffe qu'il a reçue dimanche dernier et après la rafale de coups de poing dans la gueule qu'il va essuyer dimanche prochain, comment Nicolas Sarkozy pourrait-il encore durer ? Je veux dire, comment pourrait-il survivre à l'anéantissement provisoire de la droite, dont il n'a jamais été le vrai maître-d'oeuvre, mais qui pourtant ne saurait être imputé qu'à lui seul (eh oui, en politique aussi, les conseilleurs ne sont jamais les payeurs) ? Réponse : en dissolvant !
Car pour improbable qu'elle paraisse aujourd'hui, une dissolution de l'Assemblée nationale serait, pour Nicolas Sarkozy, le meilleur moyen (et surtout le seul) de prendre tout le monde totalement à contrepied, de rester en même temps maître d'un jeu qu'il ne maîtrise plus du tout au moment où j'écris ces lignes, et de faire une Grande lessive dans une droite salie aux yeux de ses membres par les pièces rapportées du socialisme, mais davantage salie encore aux yeux du chef de l'Etat lui-même par l'intolérable défiance d'une bande de pleutres qui se cachent la tête entre les jambes au premier petit grain.
Imaginez : plus d'Assemblée, plus de gouvernement (donc plus de connard de Fillon pour se la péter discret pendant que je ne peux plus lui arracher la tête, en plus il croit que je ne vois rien cet enculé !), et plus d'opposition non plus à l'intérieur ni à l'extérieur de MA maison (!) ; à tous les coups, ma légitimité de Sarkozy, en tant que président beaucoup plus respectueux qu'on le pensait jusqu'ici de l'esprit profond de la démocratie, en sortirait même infiniment plus renforcée que si j'avais fait la queue au bureau de vote dimanche dernier avec Carla (arf-arf) !
Plus intéressant encore, pour le même prix, mes Vrais fidèles auraient enfin du temps pour saigner dans l'ombre les enfants de salauds qui ne seraient pas résolument contre un Fillon président de la République en 2012, et ce sans même avoir à s'occuper de ces crétins de socialistes qui n'ont jamais eu besoin qu'on les pousse pour se bouffer le nez dès l'annonce de la mise sur le marché de 577 postes de députés que je tiens encore dans ma pogne (qu'on se le dise) !
Aveuglés, eux aussi, par leur mégalomanie du moment, même ces beatniks de Verts et les bourgeois du FN qui puent la camomille se déchireraient jusqu'à la mort, jusqu'à répugner les naïfs qui ont voté pour eux pour faire main basse sur un maximum de bancs dans MON hémicycle sans voir venir un retour en force d'une nouvelle UMP pensée et redessinée par MOI, et qui ne pourrait que LARGEMENT bénéficier d'un effacement de l'ardoise à grands coups de seaux d'eau !
Y'aurait plus de problèmes, y'aurait plus que des coffres à vider et des ennemis à buter !... Plus j'y pense, plus c'est génial comme plan !
La dette ? Mes voyages pendant lesquels je me touche ? Ma femme qui a le Q.I. d'une poule, mes copains chefs d'entreprise qui ne savent plus où planquer leur pognon, le développement durable et toutes ces conneries qui ne m'ont jamais intéressé que parce que je pouvais m'amuser comme un môme en les tripatouillant ?... Les Français n'en auraient plus rien à foutre ! Ils seraient assez cons pour marcher, pour courir une deuxième fois, pour croire que JE suis vraiment un Grand Président et pour oublier toutes les imbécilités que je me suis réjoui d'avoir empilées en toute impunité !
YERK-YERK !
...
C'est de la politique-fiction bien sûr (quoique), mais j'avoue que si j'étais dans les pompes de Nicolas Sarkozy ce jeudi d'avant le second tour des élections régionales, j'estimerais sans doute l'idée suffisamment, comment dire, intéressante pour me pencher très sérieusement dessus : au pire, deux ans à tenir avec des handicapés socialistes pour recevoir les tomates et les oeufs pourris dans la gueule à ma place jusqu'en 2012... Quant à MOI, JE pourrais enfin rester à buller dans MON château au milieu de MA cour, ou ME promener quand JE voudrais et passer MES vacances où JE voudrais sans plus avoir de comptes à rendre à de sales pauvres qui ont eu le front de ne plus croire en moi !
Ensuite, après les vacances (en 2012), je me repointerais frais comme un gardon pour refaire aux imbéciles qui m'ont déjà élu un coup de Jarnac Magistral, sauf que cette fois-ci, je les sécherais pour le compte, ces salopards qui m'obligent à revoir tous mes plans après trois ans de bulle et d'amour-passion avec mon nombril qui me convenaient très bien !
Bon sang mais c'est bien sûr : la solution, c'est la dissolution !