Le plan de Sarkozy pour court-circuiter Bayrou
Si Nicolas Sarkozy ne peut pas soumettre François Bayrou, il le détruira (donc, Nicolas Sarkozy va essayer de détruire l'ex-candidat centriste) : l'information n'est pas celle qui a fait le plus de bruit aujourd'hui, mais Nicolas Sarkozy réfléchirait à l'opportunité de créer un nouveau parti centriste à partir de l'effectif formé par les députés UDF qui se sont déjà ralliés à l'UMP en vue des législatives.
En français, cela signifie que Nicolas Sarkozy menace François Bayrou de tout faire pour détruire l'UDF si le béarnais ne se rallie pas à sa cause. Pas forcément en donnant une consigne de vote explicite, mais en cessant au moins de s'opposer au Napoléon de l'UMP sur le terrain des idées. Sarkozy ne supporte pas la contradiction et il est impatient de nature, il vient de le rappeler à François Bayrou.
Réunissant aujourd'hui (quand je dis aujourd'hui je parle de la journée de mardi) des parlementaires UDF pour, officiellement, discuter du second tour, Bayrou n'était pas encore au courant du nouveau "coup" monté par le patron de l'UMP pour le forcer à lui faire allégeance. On verra ce qu'il en pense demain, car Bayrou doit s'exprimer à 15h30 (en direct sur iTélé notamment) dans une allocution au cours de laquelle beaucoup pensent qu'il ne dira rien de particulier. Pas ce que tout le monde fait mine d'attendre en tout cas, à savoir donner une consigne de vote.
Au contraire, prenant en quelque sorte Nicolas Sarkozy de vitesse, François Bayrou pourrait annoncer dès demain la création d'un nouveau parti centriste. Il faut dire qu'à chaque minute qui passe, la situation devient un peu plus complexe et un peu plus tendue pour François Bayrou, qui voit des députés UDF continuer de se rallier à l'UMP, d'autres lui demander de prendre parti et d'autres, encore, lui demander de ne pas donner de consigne de vote... Il était temps que Bayrou reprenne la main, et il essaiera sans doute de le faire demain.
Une page d'histoire se tournera peut-être pour Gilles De Robien, qui devait déjà se voir en possible patron d'une émanation centriste de l'UMP dirigée par le bon Nicolas Sarkozy : après l'annonce par François Bayrou du fait qu'il ne donne pas de consigne de vote et l'annonce, qui suivra peut-être, de la création d'un nouveau parti (on verra demain en quoi cela consiste exactement), De Robien pourra dire définitivement adieu à l'UDF, car il est vraiment allé trop loin dans ses séances de frotti-frotta avec Nicolas Sarkozy.
Ségolène Royal assistera à tout ce barnum en simple spectatrice, car elle n'entrave rien à ce genre de choses. En meeting ce soir à Montpellier et plus tôt dans la journée, elle a dit à l'attention de François Bayrou qu'il était possible d'ajouter des choses au pacte présidentiel (qui est déjà un bordel monstre) et que "bien sûr", il y aurait des ministres UDF dans le Gouvernement si François Bayrou adhérait au pacte. Autant dire qu'il faudra que Ségolène Royal ingurgite encore quelques tonnes de poisson avant que l'on puisse vérifier la théorie selon laquelle le poisson rend intelligent...
Pour François Bayrou, contrairement à Ségo, pas le temps de rigoler. La journée de demain sera la première journée vraiment lourde de conséquences après un premier tour qui l'a vu arriver en troisième position. Aujourd'hui, le béarnais a pris la température auprès de ses fidèles, qui font bloc autour de lui. Demain, il devra envoyer un message clair à Nicolas Sarkozy pour lui signifier qu'il n'a pas l'intention de vendre l'UDF, idem pour Ségolène Royal qui avec ou sans François Bayrou se voit déjà dans le fauteuil présidentiel.
La parole est maintenant à Bayrou, qui va peut-être arriver à démontrer que "le centre", c'est aussi un espace qui peut continuer à exister sans l'aide de personne, entre un énervé qui veut soumettre tout le monde et une mégalomane qui méprise au moins autant de gens. Je pense que Bayrou survivra à tout ça et que demain il remportera son pari, mais à quel prix ? Les législatives seront déterminantes pour tout le monde, surtout pour François Bayrou.
Tout ça pour quelques électeurs que Sarkozy et Royal trouvent trop cons pour décider de leur sort par eux-mêmes... Dire que le prochain président sera un de ces deux-là !