Le Cerveau s'échappe encore !
Vous connaissez tous "Le Cerveau", film dans lequel un braqueur de haut vol s'empare de tout l'argent contenu dans une voiture du train postal Glasgow-Londres.
Eh bien ces jours-ci, le Cerveau c'est Jacques Chirac, celui à-propos duquel on pense qu'il a tout fait (surtout quand c'est sale) mais contre lequel on ne peut jamais rien prouver, en particulier quand on ne le veut pas vraiment : bien que son nom soit sans cesse revenu dans chacun de ces dossiers, l'ancien président de la République n'a pas vraiment été inquiété dans les affaires des emplois fictifs du RPR et le la mairie de Paris. Quand les choses ont commencé à se gâter et que les juges ont décidé qu'après tout, un demi-chauve en valait bien un autre, Jacques a abandonné sans ciller son plus fidèle lieutenant, Alain Juppé, entre les mains de la justice. Trois ans et demi après sa condamnation, Alain Juppé est mort. Politiquement.
Rebelote dans l'affaire ClearStream, dont Jacques serait encore à l'origine : il s'agirait cette fois-ci d'un vaste complot visant à discréditer Nicolas Sarkozy, auprès de ceux qui lui accordaient du crédit dans le passé et qui ne sont peut-être pas si nombreux qu'on veut bien nous le dire aujourd'hui, maintenant que Nicolas est devenu président de la Sarkozie...
Dans cette nouvelle affaire qui est déjà, euh, ancienne, c'est Dominique de Villepin qui devra vraisemblablement rendre des comptes à la justice et qui, comme Juppé avant lui, a été lâché par un Jacques qui va jusqu'à faire dire par d'autres qu'il urine sur les juges : le domicile de l'ancien premier ministre, qui n'était pas chez lui ce matin, a été perquisitionné pendant six heures par les enquêteurs qui travaillent sur le dossier ClearStream.
Une affaire édifiante, comme le souligne le commentaire étonné, voire incrédule de Groucho Marx dans le sujet "Villepin : le petit complot va sortir !". Notre bon Groucho semble beaucoup surestimer ses semblables, ignorer aussi que le grade de général est tout sauf un gage d'intelligence ; de la même manière que J. Edgar Hoover, malade mental notoire, notait ou faisait tout noter sur tout et sur tout le monde, ils sont nombreux les Rondot qui, dans l'hexagone ou ailleurs, n'aiment rien tant que de nager dans leurs petites notes, d'empiler des carnets, de retranscrire sur PC des conversations dont ils veulent garder une trace au cas où...
Souvent, le volume d'informations est énorme, mais tout aussi souvent, les informations elles-mêmes n'ont d'intérêt que dans le cerveau dérangé de celui qui les collectionne. Parfois pourtant, elles valent de l'or ou, en l'occurrence, des ennuis aux ânes comme Villepin qui ont permis que leur nom figure dans certains des documents retrouvés ou "restaurés" par les enquêteurs.
On ne s'improvise pas filou ! Et on est rarement intelligent quand on est persuadé de l'être au point où Dominique de Villepin semble en être persuadé... Groucho a du mal à gober la version officielle et c'est normal. Il n'a peut-être pas lu des bouquins comme ceux d'Alphonse Boudard, ni fréquenté ce genre d'individus qui "notent", qui classent, qui trient, qui jouissent d'entasser ce qu'ils vont jusqu'à voir comme d'authentiques pépites d'or, sans savoir pourquoi ni même se demander si leurs caisses de papelards servent à quelque chose...
Personnellement, rien ne me paraît rocambolesque dans la manière dont les informations ont été récupérées par la police dans l'affaire ClearStream. Rien d'anormal ou de suspect non plus, a priori, dans la découverte d'un Rondot qui serait complètement déjanté, qui coucherait tout sur le papier et qui garderait des fichiers hautement sensibles sur le "dur" de son ordinateur portable, comme un gosse qui planque dans un petit coffret fermant à clé une vieille pièce en laiton qu'il a trouvée dans une merde de cheval... On a vu bien plus rocambolesque que ça, et l'expérience montre que bien souvent, plus l'histoire est énorme, plus il existe de chances pour qu'elle soit vraie jusque dans les moindres détails.
Démêler le vrai du faux, fouiller, comparer, recoller les morceaux... C'est le boulot des policiers, des fouineurs, des experts payés pour passer parfois des jours à reconstituer un unique fichier informatique à l'aide de logiciels de récupération de données, d'éditeurs de secteurs, de programmes de gestion de partitions que l'on peut télécharger et même cracker sans problème sur le ouèbe. Tous ces outils sont bien connus des initiés dont certains, d'ailleurs, adorent briller en se faisant passer pour des génies de l'informatique (qu'ils ne sont pas toujours).
Pourquoi fallait-il tuer Villepin "maintenant" ? C'est la seule question qui se pose encore. Car avec les bons outils, il n'a sans doute fallu que quelques heures (ou minutes !) à un utilisateur avancé pour faire le tour de tout ce que l'on pouvait trouver sur le PC du général Rondot : données affichées, masquées, cryptées, effacées... aucun problème pour y accéder ! Il n'y a guère que pour reconstituer certaines données effacées et fragmentées que ça a pu devenir sportif, mais quand bien même : il est INCONCEVABLE que les enquêteurs n'aient pas trouvé beaucoup plus tôt qu'on nous le dit les informations qui les intéressaient sur l'ordinateur du général Rondot.
J'en déduis qu'il doit se passer en coulisses beaucoup de choses dont nous ne sommes pas informés, comme un plan visant, par exemple, à éliminer les traces les plus compromettantes d'une intervention directe de Jacques Chirac dans l'affaire ClearStream... A moins que les enquêteurs qui ont travaillé dès le départ sur l'ordinateur de Rondot ne soient des burnes (ce qui est possible mais peu probable), et qu'un utilisateur plus intelligent ou calé qu'eux n'ait passé, des mois plus tard, la même machine au crible, y trouvant des choses que l'on n'avait pas vues... Hypothèse plutôt fantaisiste. Bizarre, tout ça. J'ai du mal à m'empêcher d'y voir une sorte de complot, mais pas le complot dont on nous parle, un autre. Dans le cadre duquel "quelqu'un" semble avoir décidé du moment où il convenait de clouer Villepin au pilori. Oui, tout cela respire un peu trop la manipulation et la vengeance...
Quoiqu'il en soit, l'objectif est atteint : le "Cerveau", Jacques Chirac, peut dormir sur ses deux oreilles. Son évasion est réussie, car l'ensemble de l'affaire est devenu si complexe et si difficile à démêler que l'objectif, pour beaucoup, était devenu de trouver une "autre" tête de Turc que l'ancien président de la République.
Ce sera Villepin. Car il faut que ce ne soit pas Jacques Chirac. Alea jacta est.
Villepin : le petit complot va sortir !
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