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Poliblog indépendant
29 août 2007

France : la nouvelle poubelle de la CIA

Manuel_NoriegaBientôt libérable aux Etats-Unis où il purgeait une peine de trente ans de prison depuis 1990, ramenée depuis à 17 ans pour bonne conduite, l'ex-chef de l'Etat du Panama Manuel Noriega pourrait terminer ses jours en prison en France, où il avait été condamné par contumace à dix ans de prison en 1999 pour blanchiment d'argent.

En catapultant Noriega chez les "fromages qui puent", les Américains atteindraient un triple objectif.

D'abord, éviter que Noriega retourne au Panama, où il pourrait réactiver d'anciens réseaux qu'il a eu tout le temps de connaître et même de monter au cours de 25 années de pratique intensive du renseignement et de trafics divers. Sachant, surtout, que Noriega devrait logiquement échapper à deux peines de 15 et 20 ans de prison qui avaient été prononcées contre lui au Panama pour l'assassinat de deux opposants... : âgé de plus de soixante-dix ans (on évoque le nombre de soixante-treize, mais la date exacte de naissance de Noriega semble toujours inconnue), Manuel bénéficierait d'une nouvelle loi déjà entrée en vigueur au Panama qui permet aux détenus âgés d'être assignés à résidence plutôt que d'être jetés en prison. Noriega "presque" libre ? Impensable pour une Amérique qui ne jure que par la prison à vie et par la peine de mort, que l'on aime tant aux U.S.A. que l'on s'est creusé la tête pour trouver différents moyens de l'appliquer !

Second objectif pour les Etats-Unis, ne pas laisser s'installer un précédent qui pourrait permettre de dire ou de penser qu'un ennemi juré des Etats-Unis peut s'en sortir au bout d'un certain temps : même si Noriega a longtemps roulé pour la CIA, sa mise hors-circuit était devenue une priorité pour l'Amérique de George Bush père, qui avait fait du combat contre la drogue une tarte à la crême idéale pour distraire les Américains pendant que le pays partait économiquement en lambeaux. La chasse à l'homme démentielle qui a précédé la mort de Pablo Escobar dans des conditions aussi rocambolesques que suspectes date de la même époque : Escobar et Noriega étaient liés par un accord qui permettait au cartel de Medellin, premier producteur de drogue de Colombie, de faire transiter sa marchandise par le Panama avant qu'elle ne parte ensuite pour les Etats-Unis, où elle inondait toute la région de Miami... Reboucler Noriega, c'est faire oublier cette période sombre où l'Amérique s'est montrée incapable d'enrayer un trafic de drogue qui tuait directement ou indirectement des dizaines de milliers d'Américains. Et puis, le pourrissement de Noriega dans une geôle française permettrait de n'adresser aucun signe susceptible d'encourager une reprise de grande ampleur d'un trafic qui, à la fin des années 80, déstabilisait plus de la moitié de l'Amérique du Sud (Colombie, Bolivie, Pérou, Brésil, Panama) et la quasi-totalité de l'Amérique centrale, en remontant jusqu'au Mexique vers le Nord... Non, vraiment, il ne faut ni que Noriega retourne au Panama, ni qu'il puisse revoir la lumière du jour d'un autre endroit que depuis le fond d'une cellule.

Troisième objectif, l'extradition de Noriega vers la France permettrait aux Etats-Unis de se débarrasser purement et simplement d'un homme très petit mais qui n'est pas pour autant l'élément le moins "bruyant" dans toute une galaxie de personnages et d'affaires qui n'ont jamais vraiment cessé de poser des problèmes à différents services américains (surtout la CIA et le FBI). Longtemps (aujourd'hui encore), les faux barbouzes et les petits génies américains des milieux de l'espionnage ont fricoté avec tout ce que la planète a compté de gens infréquentables, plusieurs affaires s'étant même retournées d'une façon très spectaculaire et violente contre les Etats-Unis : assassinat de Kennedy à Dallas par un Lee Harvey Oswald (il paraît) qui était bien connu du FBI et de la CIA, affaire de l'Irangate avec opérations secrètes de la CIA sans aucun mandat au Nicaragua, où les comiques de Langley donnaient dans le trafic d'armes et le trafic de drogue hors de tout contrôle du Congrès américain, formation de Ben Laden et contribution active au développement d'Al-Qaida, responsabilité majeure des services américains dans la réussite des attentats du WTC qui auraient pu (et même dû) être évités... Tout ce qui peut aujourd'hui contribuer à effacer l'ardoise est devenu bon à prendre : vu son âge, et bien que la France ait donné semble-t-il l'assurance aux Etats-Unis qu'en cas d'extradition, Noriega serait rejugé chez nous, on se dit que le général pourrait avoir la bonne idée de mourir en cellule si sa condamnation à dix ans de prison était maintenue dans l'hexagone (sous réserve que son état de santé soit compatible avec la détention). Mort, Noriega ne serait évidemment plus un problème, juste une ligne supplémentaire à rayer sur une longue liste de dettes, de petites bricoles à faire oublier...

La France acceptera-t-elle de jouer le rôle de poubelle de la CIA, du FBI, de la DEA, etc., en nourrissant Noriega aux frais du peuple français jusqu'à la fin de ses jours ? Pour l'instant, ce serait plutôt oui (!), car chez nous, si l'on ne trouve que rarement de la place en cellule pour héberger aussi longtemps qu'il le faudrait des gens comme Francis Evrard, le pédophile, ou Romain Dupuy, l'auteur présumé du double meurtre de Pau, on en trouve toujours plusieurs pour héberger gratuitement des personnages comme Manuel Noriega. Au nom, ces jours-ci, du rapprochement entre la France et les Etats-Unis voulu par le président de la République (ainsi, il n'est pas abusif de penser que Nicolas Sarkozy et les Bush père et fils ont pu parler de Manuel Noriega à Kennebunkport) : après tout, que ne ferait-on pas pour aider un ami à se nettoyer ?

La justice américaine approuve l'extradition de Noriega vers la France
http://www.latribune.fr/info/La-justice-americaine-approuve-l-extradition-de-Noriega-vers-le-France-914-~-AP-USA-PANAMA-FRANCE-NORIEGA-$Db=News/News.nsf-$Channel=Monde

Feu vert à l'extradition de Noriega
http://www.radio-canada.ca/nouvelles/International/2007/08/28/007-noriega_extradition.shtml

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