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Poliblog indépendant
5 novembre 2007

Nicolas Sarkozy : le président le plus fort du Monde ?

PopeyeBon, il semblerait que comme quelques-uns, je n'ai pas véritablement compris à quel point Nicolas Sarkozy est le héros que nous attendions tous, dont nous avions besoin depuis si longtemps, sans même le savoir pour beaucoup d'entre nous. Il va pourtant falloir que je m'y fasse...

Mais voyons l'équation qui m'a permis de passer à ce niveau de conscience supérieur : ce dimanche, Sarkozy est allé au Tchad où il a tapé sur l'épaule de Déby. Le bon Idriss, découvrant avec beaucoup d'émotion une forme d'amitié virile que l'homme n'avait jamais connue auparavant, a été fort émoustillé par cet attouchement inattendu, et redoutant de s'évanouir si Sarkozy le caressait une deuxième fois, il a fait en sorte que les mandats de dépôt des hôtesses espagnoles et des journalistes français soient levés : affaire pliée ! Déjà.

Après une rapide allocution des deux chefs d'Etat (Idriss regardant Nicolas à l'insu des journalistes, qui comme d'habitude n'ont rien noté du trouble qui s'était emparé du président tchadien), dans un décor scandaleusement luxueux pour un pays pauvre comme le Tchad, il ne restait plus à Sarko qu'à sauter dans l'A380 présidentiel (au grand désespoir d'Idriss) pour ramener les sept Européens à la maison, libres bien qu'étant toujours mis en examen.

Tonnerres d'applaudissements de la presse (pendant qu'Idriss pleurait à chaudes larmes), qui ne tarit pas d'éloges sur un président qui se déplace si vite que, désormais, Speedy Gonzales fait figure de tortue à-côté de lui ! Mieux que de se déplacer très vite, d'ailleurs, par son voyage au Tchad Sarkozy a confirmé qu'il était devenu pour les problèmes internationaux ce qu'une bouteille de Destop est pour des chiottes bouchés : on en passe un coup et tous les bouchons sautent, alors admiration. Tout le monde qui se déplace, à Villacoublay, à commencer par les huiles de l'Armée de l'Air, ces casquettes blanches qui disparaissent du 1er janvier au 31 décembre mais qui, hier soir, s'étaient déplacées en nombre pour accueillir le héros (oui) ! Libérateur de taulard(e)s injustement bouclé(e)s, c'est quand même pas rien boudiou ! Même si l'on trouve toujours, en grattant un peu, des raisons de ne pas être un fan de Nicolas Sarkozy...

Primo, les hôtesses espagnoles avaient été recrutées en tant qu'hôtesses (évidemment) pour un vol civil dont on avait dû leur cacher la véritable nature. On peut donc partir du principe que leur mise en examen par la justice tchadienne a été, sinon injuste, du moins un peu précipitée, chose qui peut s'expliquer assez rapidement : faute de temps, et pour frapper un grand coup aux yeux des Européens, qui ont un peu trop tendance à prendre les Africains en général pour des arriérés vêtus de pagnes, les Tchadiens ont choisi dès le départ de mettre tout le monde dans le même sac. Méthode quelque peu radicale, soit, mais qui aura au moins eu le mérite de provoquer l'impact (retentissant) voulu par Déby, à quelque distance du déploiement d'une force européenne au Darfour où, on prédit, beaucoup de militaires percevant double solde vont salement s'emmerder pendant des mois... Sur le primo, donc, disons qu'avec ou sans Sarkozy, les hôtesses espagnoles ne pouvaient qu'être libérées, leur détention pouvant immédiatement être considérée comme abusive par des gens qui prendraient le dossier en route. Le problème était surtout de savoir qui se dévouerait pour aller les chercher, et c'est Sarkozy qui s'y est collé.

Deuzio, et là c'est un peu plus dérangeant, l'effectif des journalistes français "ramenés" du Tchad par Nicolas Sarkozy comptait trois personnes, deux suivant l'association l'Arche de Zoé en tant que journalistes, donc dans le cadre d'un métier qui n'a rien à voir avec les activités de l'association, et une troisième qui se trouvait en congé, au cours duquel elle travaillait main dans la main avec les pieds nickelés de l'humanitaire, tout au moins jusqu'au moment de son placement en garde à vue (information communiquée et maintes fois reprise par tous les médias depuis l'arrestation des pieds nickelés). Problème, Sarkozy a bien ramené les deux journalistes qui faisaient ce que leurs patrons appellent un "boulot" (filmer pour dénoncer, mais seulement une fois qu'on est rentré à la maison, etc.), mais il a ramené avec eux la journaliste de France 3, pour laquelle on ne voit pas bien quel motif pourrait être invoqué qui légitimerait la levée du mandat de dépôt... Pour dire les choses plus clairement, la journaliste concernée "aurait" fait l'objet d'un traitement de faveur proprement scandaleux par rapport aux Français qui sont restés au Tchad, dans la mesure où, toujours d'après les médias, elle aurait collaboré activement et en toute connaissance de cause à l'opération avortée de l'Arche de Zoé. Pas super pour Sarkozy, qui mine de rien (ou à son insu si toutefois c'est possible) aurait soustrait une marchande d'enfants présumée à la garde des Tchadiens... Le mythe du héros en prend un coup.

Tertio, et là on revient dans le scénario déjà plus "traditionnel" de l'opération de com aussi tapageuse que possible montée rapidement par un Sarkozy qui veut faire passer la véritable actualité au second plan (résultats économiques catastrophiques, taux de chômage "réel" exceptionnel en Europe, etc.), des magistrats tchadiens dénoncent déjà, anonymement, des pressions qu'ils disent avoir subies venant de la présidence (tchadienne) pour accélérer le mouvement... En gros, la visite de Sarkozy au Tchad était connue dès le samedi (au moins), et Déby ou des Déby boys auraient fait pression sur les magistrats pour que les journalistes français et les hôtesses espagnoles soient libérables dès le lendemain, c'est-à-dire dimanche, alors qu'habituellement... le palais de justice de N'Djamena est fermé le dimanche ! D'autre part, pour des raisons techniques disent les magistrats qui n'osent pas se dévoiler, il était impossible de libérer les journalistes et les hôtesses avant mercredi, l'accomplissement du miracle s'expliquant alors par le fait que l'on "ne pouvait pas laisser repartir Nicolas Sarkozy les mains vides"... Dès lors, le mythe du héros prend un deuxième coup, sans même parler des pressions qui ont pu (dû) être exercées par l'Elysée sur la présidence tchadienne.

Bien sûr, il y a toujours plusieurs manières d'analyser ce genre d'événements. Disons qu'entre les versions tendancieuses des pro-Sarko et les versions tout aussi tendancieuses des anti-Sarko, il existe un petit espace qui pourrait s'appeler "ce qui est probable", et ce qui est probable, en l'occurrence, c'est que Sarkozy n'a fait que sauter sur une occasion de reléguer au second plan d'autres sujets d'actualité (bien) moins favorables pour l'homme. Accessoirement, dans le cadre de la vague stratégie qui le pousse à toujours se comporter en Popeye aux yeux des Européens (lesdits Européens étant un peu l'Olive de Sarkozy), Nico aurait pris Zapatero de vitesse, un Zapatero qui semble d'ailleurs s'être fait quelque peu tirer l'oreille pour aller accueillir le globe-trotter français à sa descente d'avion, lors d'une courte escale à Madrid pendant laquelle on a éjecté les hôtesses du "territoire national volant"...

Au cours des jours à venir, on évitera de creuser toutes ces questions, permettant aux vrais desseins de Nicolas Sarkozy de se réaliser, car pendant qu'on parle du dernier show du président français au Tchad pour en extraire des innocent(e)s et une journaliste qui le serait beaucoup moins, on ne parle pas des Français qui crèvent dans la rue, ni de ceux qui cherchent un boulot, ni de ceux qui se serrent la ceinture au point d'en étouffer pour bouffer des pâtes à la fin de chaque mois... Accessoirement, on ne parle pas non plus des grèves qui vont commencer le 13 novembre (le 12 au soir, probablement), et qui pourraient bien être l'occasion d'un bras de fer jamais vu entre un président qui défie toute la fonction publique et des fonctionnaires qui n'ont pas tous envie de travailler plus.

Les reptations des médias, en tout cas (fièrement représentés par Patrick de Carolis, qui comme d'autres s'est empressé d'aller lécher la main de Nicolas Sarkozy dès son arrivée à Villacoublay), auront sans doute eu quelque chose de très comique pour un acteur qui, au fond... a toutes les raisons de continuer à se la péter. Monstrueusement.

P.-S. : Nico, je me suis laissé dire que, lisant peut-être le Poliblog, tu avais déposé les pingouines en route. Je t'en remercie, au nom du porte-monnaie des Français. Je profite de l'occase pour te rappeler que si tu veux faire encore plus d'économies, la prochaine fois tu peux très bien rester à l'Elysée, car des Français injustement incarcérés, je pense qu'il doit y avoir moyen d'en trouver chez nous...

P.-P.-S. : très habile de t'être précipité pour libérer les seuls journalistes, t'attirant ainsi (sans trop d'efforts) les bonnes grâces de toute la corporation ! Je n'aurais pas fait mieux, coquin que tu es !

Arche de Zoé : Sarkozy a quitté le Tchad accompagné des sept Européens
http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/international/20071104.OBS2816/arche_de_zoe__sarkozy_a_quitte_le_tchad_accompagne_des_.html

Des magistrats tchadiens dénoncent des "pressions"
http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/international/afrique/20071104.OBS2902/des_magistrats_tchadiens_denoncent_des_pressions.html

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Commentaires
P
D'ailleurs c'est ce que Sarkozy fait constamment. :(
A
Bonjour, <br /> <br /> En voici un billet qui a le mérite de dire ce que l'agité est vraiment: un PETIT <br /> Où va la France ? Comment faire pour ne pas se prendre les platanes ? <br /> <br /> A+
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