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Poliblog indépendant
3 mars 2008

Le conseil des ministres vu de l'intérieur : une quarantaine de larves autour d'une table ovale

conseil_des_ministresSi vous n'avez pas encore acheté Le Point de cette semaine paru jeudi dernier (donc le 28 février), la lecture des pages 42 à 44 vaut à elle seule quasiment le prix du magazine.

Dans un texte tout à fait dans la lignée de la biographie non-officielle qu'elle avait écrite sur Cécilia, qu'après avoir appelé "la première dame" on n'appelle plus rien du tout (...), Anna Bitton nous ouvre les coulisses a priori habituelles des conseils des ministres tels qu'ils se déroulent sous la haute autorité de sa Suffisance Nicolas Ier.

Il suffit de cliquer sur la photo (extraite de l'article du Point, je sais ce n'est pas bien) pour se faire une idée de la situation ubuesque du gouvernement français, pour lequel le conseil du mercredi est un peu ce que la réunion de tous les soirs est dans certaines entreprises : en sachant très bien qu'on va s'y pignoler pendant deux bonnes heures, tout le monde y vient. C'est obligé.

Restée fidèle à un mode de narration dans lequel elle s'attache souvent plus aux apparences qu'au contenu, Anna Bitton nous relate ainsi les aspects ridicules, authentiquement fous, rarement comiques et encore plus rarement productifs de ces assemblées dans lesquelles tout le monde semble se rendre spécialement pour s'ennuyer, un peu comme si les ministres, secrétaires d'Etat et valets du président n'avaient pas d'autre objectif dans la vie que de s'emmerder, n'ayant ni famille, ni amis, pas même un chat qui les attend à la maison le soir pour recevoir sa ration de croquettes...

On apprend, par exemple, que même s'il affecte d'attacher une certaine importance à un protocole au centre duquel il doit toujours se trouver, le Führer Sarkozy, déprimé ces derniers temps, n'hésite pas à se faire apporter des cafés en plein conseil, choses que bien entendu aucun ministre ne se permettrait.

Dans le même ordre d'idées, s'il arrive au chef de son Etat de tutoyer certains ministres ou de les appeler par leur prénom, signifiant ainsi aux autres qu'ils occupent un rang bien inférieur dans une hiérarchie où il n'y a de place que pour un seul monarque, l'inverse n'arrive absolument jamais : même la grosse Roselyne, qui ne tarit pas d'éloges sur Nicolâââ quand elle parle, le regard pétillant en crachant dans les micros, de celui qui lui a évité de finir à l'ANPE ou animatrice de réunions Weight Watchers, dit toujours "monsieur le Président" quand elle s'adresse à Nicolas pendant les conseils.

Un "conseil", pour ceux qui ne sauraient pas ce que c'est, c'est une sorte de réunion de gens qui sont obligés d'y participer, et qui sont si nombreux qu'il est d'emblée impossible qu'il en sorte quoique ce soit. On ne fait donc qu'y parler, les propos tenus par l'orateur du moment n'intéressant de toutes façons que lui-même, ou dérangeant éventuellement ses voisins qui, on suppose, se seraient bien vus rester au lit le matin du jour où tout le monde doit faire des courbettes devant sa Suffisance, sans même avoir besoin de faire semblant de croire en des notions ridicules comme le travail au service des citoyens.

Récit tendancieux ou pas, le fait est que l'article d'Anna Bitton ne fait mention de rien de bien particulier. Les minutes s'égrennent, les ministres s'ennuient, et pour éviter peut-être de sombrer dans un profond sommeil, les plus actifs, comme Xavier Bertrand et Roselyne Bachelot, envoient des SMS pendant que quelqu'un parle... ou doit parler, car la chose est si organisée que malgré des bras droits, des bras gauche, un ordre du jour et tout une assistance qui devrait suivre les débats, il arrive que personne ne sache à qui c'est le tour de parler, ni de quoi on devait parler...

Dans ces cas-là, le petit Nicolas, que l'exercice semble motiver autant qu'une promenade chez Arcelor, se contente de soupirer, même pas fort. On ne reconnaît plus le président qui il y a quelques mois encore se promenait en tremblant ou en vociférant et en traitant ses collaborateurs de connards, d'incapables ou de résidus de fonds de capote peut-être... Atmosphère étrange, on se croirait un peu pendant les derniers jours du vrai Führer à Berlin, quand tout le monde savait que le grand Reich avait déjà été écrasé et que personne n'écoutait plus le maître, dont on avait compris qu'il était devenu fou quand il jurait devant Dieu que "le" soldat allemand, un gosse de 15 ans dans le meilleur des cas, viendrait à bout du boucher soviétique grâce à son courage et à la force que le Reich lui insufflait...

Au sommet de l'Etat, du moins quand on lit l'article d'Anna Bitton, on se dit que la situation est très similaire, tout le monde semble partir du principe que c'est "foutu" : les postes avec des collègues qui vont valser, la grande époque où l'on pouvait s'engager sur toutes sortes de conneries sans qu'un seul grand organe de presse ne relève le ridicule des propositions émises, la France aussi... Foutue. Des mots ou expressions comme emploi, pouvoir d'achat, système de santé ou prestige de la France dans le Monde ne sont jamais évoqués.

Rien à voir avec les discours du petit Nicolas, qui dans ses dernières crises de delirium donnait l'impression de toujours se voir comme le président de tout, le véritable booster d'une politique de civilisation à un diram qui, on en est certain aujourd'hui, n'existera jamais que dans le cerveau chancelant, malade peut-être, d'un type qui n'a résolument jamais été à sa place.

Tout au plus le mari de Carla ouvre-t-il un oeil quand on lui annonce les nominations ou disparitions du jour, à savoir ceux qui vont entrer en fonction ou en quitter une qu'ils occupaient. Sortant de sa léthargie malgré le café, Sarko enrage, avec autant d'énergie qu'un grabataire, du fait qu'on ait "osé" promouvoir quelqu'un qui avait été contre "Nous" (Nous étant lui, Nicolas Sarkozy) à une certaine époque. De la même manière, parlant du départ d'un haut fonctionnaire, le président de sa République dit qu'il ne manquera à personne, énième comportement de jean-foutre qui n'émeut plus personne même si de mémoire de ministres, on n'avait jamais pu observer un tel manque de tenue sous aucun de ses prédécesseurs.

Avec moi-moi-moi, c'est différent. On nage dans le délire le plus total, à tel point que Louis XIV a été remplacé par Louis le cent-quarantième. Au moins. Tellement centré sur sa personne, assise à la même table que les autres mais qui mentalement se trouverait presque au niveau du lustre, qu'il ne s'offusque pas quand son voisin Fillon tripote son iPhone, ou quand Xavier Bertrand pique le téléphone portable de Roselyne Bachelot pour envoyer un SMS à Fillon lui disant, en plein conseil, que sa cravate est moche... Ca vole très haut.

Tellement haut, en vérité, qu'on ne s'étonne pas du tout de l'extraordinaire état de délabrement de la France en lisant les, allez, deux pages et demi d'Anna Bitton sur le déroulement d'un conseil des ministres. Disons qu'on n'y fait jamais rien, et qu'entre deux conseils hebdomadaires, on ne fait jamais rien non plus.

Il ne se trouve guère que quelques cloportes pour dire et penser, rappelle Anna Bitton, que l'important dans un conseil des ministres, ce n'est pas ce qui s'y dit, c'est d'en être. Raison pour laquelle on verrait en ce moment Bertrand se rapprocher discrètement de Rachida Dati, pour le plus grand amusement de certains "collègues" qui se demandent jusqu'où Xavier serait capable de dérouler la langue pour obtenir un poste...

Climat pour le moins curieux. Contrairement à ce qu'on pourrait penser, contrairement à ce qu'on nous dit volontiers un peu partout, tout le monde semble se foutre royalement de savoir s'il y aura ou non un remaniement, Sarkozy le premier, qui bien que distribuant quelques bons points par-ci par-là ne lève même plus le poing pour proférer des menaces qui ne font plus trembler personne depuis longtemps, tout le monde ayant compris que la seule personne qui l'empêche vraiment de dormir est François Fillon et personne ne prenant plus, pour le reste, au sérieux les pitreries mollasses d'un faux manager qui n'aura fait que conduire tout le monde au bord du même gouffre.

Autant dire que le prochain remaniement, car remaniement il y aura, pourra être un véritable carnage tout comme il pourra être un ridicule ajustement, le chef de son Etat ne s'échinant même plus à essayer de persuader les Français qu'ils peuvent encore compter sur un "changement"...

Finalement, il était assez approprié quand on y repense, ce fameux, ce célèbre slogan de "rupture tranquille" : d'abord, on aura eu droit à toutes les bourrasques imaginables, le président traînant sa propre fonction mais aussi la politique en général et la France dans la fange comme elles ne l'avaient jamais été auparavant, et pour la suite, ben seuls les irrécupérables n'ont pas encore compris que personne n'aura strictement rien. Sauf peut-être un Chirac avec 22 ans de moins, c'est-à-dire déjà d'après l'époque où l'on avait appelé Jacquot "cinq minutes douche comprise".

La seule chose qui ait vraiment changé, c'est que pour s'occuper, Bernadette avait les pièces jaunes, alors que pour faire passer le temps, Carla reluque son propre cul sur papier glacé ou sur des pochettes de CD.

S'il n'y avait pas les petits papiers qui circulent pendant les conseils des ministres, où les intéressés les plus irrespectueux de la bande s'échangent des invits et (ou) des blagues, on jurerait qu'on assiste dans le texte d'Anna Bitton à un conseil d'administration tout à fait ordinaire du groupe EADS, juste avant l'effondrement du cours de l'action et l'annonce de 10.000 suppressions de postes.

En conclusion, quand un inconnu dit "touche-moi pas" à Nicolas Sarkozy, prétextant que le président de la République pourrait le salir et que ce dernier, en réaction, lui répond "ben casse-toi alors pauvre con", on ne sait vraiment pas lequel des deux est le plus con. Et le plus inapte à tout.

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Commentaires
P
Au sujet de mon appel à ton beauf, laisse béton pour l'instant : ça ne va guère mieux que les jours précédents, en fait ça gaze tellement pas que j'évite de prendre la voiture dès que j'en ai l'occasion. Je ne sais pas encore ce que je vais faire, là ça devient ingérable. Sans un certain médoc que j'ai pris ce soir, j'aurais encore été incapable d'écrire une ligne... Ce matin j'ai encore pensé à fermer le blog, en fait j'y ai pensé toute la journée, mais bon, à part ça comme occupation en ce moment, ben je ne peux pas lire, pas regarder la téloche... Pas loin d'avoir le moral en berne en somme. :(
P
Il faut vraiment ne pas me connaître du tout pour me ranger dans la catégorie des poujadistes : hilarant, soit dit en passant, quand on sait à quelle type de "corporation" vous faîtes allusion ici, pour laquelle je confirme que j'ai des réactions épidermiques. ;)
O
A ranger dans votre catégorie 'Poujadisme facile'
O
Si le gaze part !
P
Je vais essayer de faire quelque chose ce soir. :(
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